mardi 31 août 2010

Chapitre 18, versets 31 à 34

Paroles incompréhensibles

Parce qu’Il les considère Ses amis, Jésus se dit qu’Il ne pouvait laisser Ses disciples ignorants de ce qui allait Lui arriver à Jérusalem où ils allaient se rendre : cf Jean 15,15. Le but de Jésus en le faisant est double : d’une part, Il veut les préparer à la vision de la faiblesse et de la défaite apparente à laquelle ils vont être brusquement confrontés par les multiples souffrances qu’Il va endurer jusqu’à la mort ; d’autre part, Il veut qu’ils sachent que ce qui va Lui arriver est dans la droite ligne du plan de Dieu, révélé dans le passé par les prophètes, et démontré dans l’avenir par la résurrection dont sera suivie Sa mise à mort. Plus que les miracles dont Il a été l’auteur, c’est la mort et la résurrection de Jésus qui attestent qu’Il est bien le Messie annoncé et promis : Rom 1,1 à 4

Malgré la limpidité des propos de Jésus, les disciples, nous dit Luc, ne saisirent rien de ce qu’Il leur disait. Si elle ne nous est pas révélée, la raison de cette incompréhension n’est pour autant pas inexplicable. Elle peut être en premier lieu le produit du déni. Entraînés par la dynamique du succès qu’avait Jésus auprès des foules, il était inconcevable pour les disciples qu’un tel scénario se produise. Comme les autres juifs, les disciples étaient habités par la vision d’un Messie qui ne pouvait que vaincre et réussir. Penser que la victoire du Messie, par laquelle le royaume de Dieu serait établi, passait par sa mort, était un concept qui ne pouvait entrer dans les paramètres de leur vision des choses. Préformatés dans leur pensée par la conception qui avait cours en leur temps, ce ne sera que lorsque les faits se réaliseront que les disciples seront à même de changer de paradygme.

L’incompréhension des disciples face à la clarté des propos de Jésus nous interpelle quant à la difficulté qui est la nôtre d’entrer dans des pensées qui ne cadrent pas avec le système qui bâtit nos croyances. A la vue de cette difficulté sur laquelle butent les disciples, on comprend mieux le pourquoi du contenu et de la formulation des prières de Paul pour les chrétiens d’Ephèse, par exemple : Ephés 1,17 à 19. Seule l’illumination que procure l’Esprit a le pouvoir de nous amener à voir, comprendre, concevoir ce qui nous était caché jusque là. Que Dieu nous donne chaque jour d’être dans les dispositions de cœur nous permettant de la recevoir !

lundi 30 août 2010

Chapitre 18, versets 28 à 30

Et nous ?

Rebondissant sur les paroles de Jésus, Pierre Lui demanda ce qu’il en serait pour eux, les disciples, qui avaient quitté métier, sécurité, profession avec un revenu assuré et tous leurs biens pour Le suivre ! Jésus l’assure : aucun renoncement volontaire vécu par ses disciples dans cette vie à cause de Lui ne restera sans récompense. Notons au passage les trois nuances que Jésus donne dans Sa réponse à la question posée par Pierre :

1ère nuance : alors que la pensée de Pierre portait, semble-t-il, surtout sur les biens desquels lui et ses amis s’étaient défaits pour Le suivre, Jésus insiste sur le poids que représentent aux yeux de Dieu les ruptures humaines conséquentes au fait d’être Son disciple. Quitter ses biens, renoncer à des richesses est une chose. Mais combien peut s’avérer plus difficile de s’arracher à l’affection de ses proches pour Le suivre. Les liens du sang étant les plus forts dans ce qui nous attache aux choses de ce monde, c’est avec raison que Jésus met l’emphase sur cet aspect du discipulat.

2ème nuance : la cause réelle du renoncement des disciples à leurs biens n’est pas seulement le fait de suivre Jésus. C’est surtout le fait de se rendre libre pour la construction du royaume de Dieu. Si le renoncement est personnel, Jésus fait comprendre ici à Ses disciples qu’il s’inscrit dans un mouvement de plus large portée que la sphère de la vie propre. Nous renonçons à des choses de cette vie et de ce monde parce que nous contribuons à la construction de quelque chose d’une valeur infiniment supérieure. N’oublions jamais les dimensions et la portée de ce en quoi nous nous investissons. La grandeur du projet et de la cause auxquels nous sommes engagés doivent dans nos cœurs et nos esprits dépasser et sublimer les pertes auxquelles nous aurons consenti pour y participer.

3ème nuance : les effets et les bénéfices des renoncements auxquels nous aurons consenti pour le royaume de Dieu ne se feront pas seulement sentir dans l’éternité, mais dès la vie présente. Renoncer à quelque chose pour le royaume de Dieu, n’est pas perdre, mais placer son bien dans la meilleure des banques. Les retombées ici-bas, même si Marc y ajoute des persécutions : Marc 10,30, comme dans l’éternité, sont à tel point bénéfiques qu’au bout du compte suivre Jésus, c’est obligatoirement être gagnant !

samedi 28 août 2010

Chapitre 18, versets 24 à 27

Le disciple de Jésus et la richesse


Bien que respectueux du choix que fait l’homme riche qui était venu vers lui avec, au cœur, la question la plus essentielle qu’un homme puisse poser, Jésus n’est pas insensible au refus de la proposition qu’Il lui a faite. C’est toujours au yeux du Maître un drame lorsqu’un homme, conscient du pas qu’il doit faire pour passer d’une vie dans ce monde à une éternité dans le royaume de Dieu, choisit, au lieu d’avancer, de faire demi-tour et de retourner et de rester là où il se trouve. Notons que, les choses dites, Jésus ne cherchera ni à les atténuer pour faciliter le chemin de l’homme riche, ni à le convaincre d’y réfléchir davantage. Les choix que nous faisons, avec les conséquences qui en découlent, n’appartiennent qu’à nous et personne ne respecte cette liberté qui est la nôtre plus que Dieu.

Si l’entretien que Jésus a eu avec l’homme riche ne lui a pas servi, tout bénéfice n’est pas perdu pour autant. Il y a toujours des enseignements et des leçons à tirer de toute expérience, rencontre, dialogue, relation que l’on a pu vivre avec autrui. Sujet déjà évoqué, Jésus souligne une fois de plus la difficulté, pour ne pas dire l’impossibilité, dans laquelle se trouve tout homme qui, attaché à ses biens, voudrait entrer dans le royaume de Dieu. Jésus le précise cependant : l’impossibilité n’existe que dans le domaine naturel. Ce qui est impossible pour les hommes, Dieu peut le réaliser dans leurs cœurs. Le riche, comme la prostituée, le voleur, le pharisien, peuvent donc aussi être sauvés, à condition que chacun, dans la situation dans laquelle il se trouve, laisse Dieu œuvrer dans son cœur et le libérer de ce qui, dans son état, l’aliène au péché.

Car, des riches, serviteurs de Dieu ou disciples du Christ, il y en a eu dans la Bible. Ils avaient seulement appris, au contact de leur Seigneur, une chose : c’est que l’on peut être riche, et tout avoir, sans rien posséder pour autant. Dans le sanctuaire de leurs cœurs, ce n’était pas l’idole de la richesse qui avait la place centrale, mais Dieu. Que cette liberté, acquise par la grâce et la connaissance de Dieu, qui habitait en eux, soit aussi en nous !

jeudi 19 août 2010

Chapitre 18, versets 18 à 23

Jésus et le chef riche

Si Jésus a souvent eu sur son chemin des hommes fourbes, hypocrites, Il a aussi croisé de temps en temps des chercheurs authentiques de réponses aux questions qu’il se posait. Tel nous paraît ce chef qui L’aborde et que, précise Marc, Jésus aima : Marc 10,21.

La question posée par ce chef ayant une certaine tournure, c’est en fonction de son contenu que Jésus répondra à celui-ci pour l’amener à l’essentiel. Jésus ne fait pas avec lui l’erreur que nous commettons trop souvent. Pressé de présenter ce que nous considérons comme le cœur du message que nous voulons transmettre, nous ne prenons souvent pas le temps d’écouter réellement celui qui se trouve en face de nous. Notre but est de l’amener à comprendre qu’il a besoin de Christ et, pensons-nous, peu importe ce qu’il croit ou a cru jusqu’à ce jour. Faux, montre Jésus ! On ne peut accrocher un wagon à un train si on ne prête pas attention à l’endroit où se trouve le crochet qui le permettra. Il en est de même pour l’Evangile. Réponse à toutes les questions d’ordre spirituel que l’homme se pose, l’Evangile ne paraîtra avoir un sens pour celui qui l’entend que si celui qui l’annonce l’accroche à l’endroit où la pensée de l’auditeur permet un lien avec celui-ci. Apprenons donc, comme Jésus, avant de parler, d’écouter ce que nous dit notre interlocuteur. Sa croyance identifiée, il nous sera beaucoup plus aisé d’entrer par la porte qu’il a lui-même ouverte pour lui faire comprendre notre message !

Deus point particuliers ont retenu l’attention de Jésus dans la question posée par le chef :

1er point : le nom sous lequel ce chef l’a interpellé : bon maître. Jésus attire son attention sur le vocabulaire qu’il emploie. Réalise-t-il vraiment ce qu’il dit ici ? Car qui, autre que Dieu, peut être qualifié de bon ? Si Jésus, homme, est bon, soit Il est Dieu, soit Il faut l’appeler autrement. Remarquons l’intelligence de Jésus qui fait réfléchir l’homme riche sur les mots qu’il emploie. Trop souvent, nos interlocuteurs utilisent des termes auxquels ils n’ont pas réfléchi jusqu’au bout. En les incitant à le faire, on les aide déjà à trouver eux-mêmes les contradictions à leur propre pensée !

2ème point : le chef préoccupé par ce qu’il doit faire pour hériter la vie éternelle, Jésus lui cite intentionnellement cinq des exigences de la loi liées à la relation avec le prochain (la 2ème table) : les exigences qui ont trait au comportement. Pour celui qui veut faire, le message de la foi comme seul moyen d’accéder au salut ne convient pas. Il lui faut d’abord découvrir son échec sur le terrain sur lequel il se trouve, le terrain des exigences morales qu’ordonne la loi.

Face aux commandements cités, le chef l’atteste : se regardant dans la glace, il n’a rien duquel il devrait rougir à ce sujet. Dès sa jeunesse, il a fait et obéi à la loi dans ces domaines. Notons que, contrairement peut-être à ce que nous aurions fait, Jésus ne met pas en doute les prétentions du chef. S’il devait être attribué une note à celui-ci, il aurait bien pour l’instant 5/10 en ce qui concerne l’obéissance à la loi. Evidemment, la note ne suffit pas. Jésus va donc poursuivre en lui montrant ce qu’il lui faut faire, puisque c’est là sa question, pour avoir 10/10. Une seule chose, lui dit Jésus : détrôner l’idole de la richesse qui siège comme dieu dans le sanctuaire de son cœur pour y mettre Jésus en devenant Son disciple.

La note du riche, pourtant éliminatoire, restera à 5/10. Sans un mot, le cœur triste par l’exigence trop forte demandée par le maître, il laissera là Jésus et s’en retournera comme il est venu. Outre le caractère regrettable de la conclusion de la rencontre entre Jésus et cet homme, l’histoire nous enseigne un point important quant aux dispositions de cœur qui font qu’un homme entre ou pas dans le salut que Dieu lui offre. Ce point est, qu’en ce domaine, la seule sincérité ne suffit pas ! La vérité seule, refusée ou acceptée, décide de notre sort final. Brisée sur l’écueil de la vérité, la sincérité laisse celui qui trébuche sur elle au même endroit que là où se trouvent menteurs et hypocrites : en-dehors du chemin du salut ! Qu’il est infiniment triste d’être sincèrement perdu !

mercredi 18 août 2010

Chapitre 18, versets 15 à 17

Jésus et les petits enfants

Soucieux de placer leurs enfants nouveaux-nés sous la bénédiction de Dieu, des parents, pour qui les prodiges que faisait Jésus ne s’expliquaient que par la main de Dieu, les Lui apportèrent pour qu’Il les touche. Les disciples,  pensant que Jésus avait bien d’autres choses à faire plus importantes que de s’occuper de bébés, les rabrouèrent. Jésus, cependant, ne l’entendit pas de cette oreille. Reprenant Ses disciples, Il accueillit ces parents et exauça leur attente.

D’apparence anodine, ce fait rapporté par trois évangiles souligne de manière forte, quant à Jésus, une vérité caractéristique de sa relation avec l’homme. S’il y a une notion nouvelle que Jésus a introduite dans le monde, c’est bien celle de l’égalité de valeur que Dieu donne à tout être, quel qu’il soit. Alors qu’avant Sa venue le prochain se pensait surtout à l’intérieur des catégories dans lesquelles chacun se trouvait, Jésus, une à une, abat toutes les barrières de séparation pour montrer aux yeux de tous que tout être, quel que soit son âge, son origine, son sexe, son rang social, est aux yeux de Dieu digne de considération et d’attention. Avant toutes choses qui le caractérisent, Jésus, croisant un être, une personne, voit l’homme. Aussi, fort de cette vision première, Jésus, nous montre l’Evangile, ne se laissera rebuter par aucun obstacle (origine, apparence…) qui l’empêcherait de rencontrer les hommes, de les toucher et de leur faire ainsi sentir l’intérêt et l’amour de Dieu pour eux : lépreux, publicains, prostituées, étrangers à la nation. L’intérêt de Jésus, manifesté ici, pour les tout petits témoigne dans ce sens.

Au-delà de l’universalité de l’intérêt de Dieu pour tout être, le passage de Jésus auprès des nouveaux-nés qu’on Lui apporte est une occasion qu’Il saisit pour donner à tous un enseignement d’ordre spirituel sur le caractère de ceux à qui le royaume de Dieu est accessible. Jésus l’affirme : de tous les êtres qui existent, les tout-petits, dans leur candeur, leur simplicité, leur vulnérabilité ou leur dépendance sont ceux qui portent en eux le plus de caractéristiques communes avec ceux qui entrent dans le royaume de Dieu. Le royaume de Dieu, pour y avoir accès, requiert de nous l’abandon de toute prétention. Comme les enfants entrant dans la vie, c’est nu, dépouillé de tout, exposés tels que nous sommes que nous devons nous présenter à la porte de ce royaume pour qu’elle nous soit ouverte. C’est là les conditions que Dieu pose ; c’est là celles que nous devons remplir : les conditions favorables à l’obtention de la grâce ! Que Dieu nous donne de nous en souvenir chaque jour !

mardi 17 août 2010

Chapitre 18, versets 9 à 14

Seconde parabole sur le sujet de la prière


Toujours à propos de justice dans le cadre de la prière, Jésus donne à Ses disciples une seconde parabole par laquelle Il souligne que ce souci de la justice, qui est le fondement à partir duquel Dieu fait droit à ceux qui font appel à Lui dans la défense de leur cause, en tant que dispositions, ne concerne pas que Lui, mais qu’il est un élément qui, pour qu’ils soient entendus, doit aussi se trouver dans le cœur de ceux qui prient. La justice du cœur étant une nécessité, la question se pose : qui sont les hommes qui, dans la prière, sont reçus par Dieu comme des justes ? Par quoi sont-ils reconnaissables ? Et, à contrario, qui sont ceux qui, bien que priant, ne peuvent être accueillis comme tels devant Dieu, l’élément de la justice faisant défaut dans leurs cœurs ? C’est pour donner réponse à ces questions que Jésus ajoute cette parabole à celle qu’il vient de donner.

Bien que présentée sous la forme d’une parabole, l’histoire que Jésus raconte n’a rien d’une fiction sortie de Son imagination. De manière intentionnelle, Jésus prend pour modèle  les types de personnage qui, dans la réalité contemporaine dans laquelle Il se trouve, incarnent le mieux ce qu’Il veut démontrer : un pharisien, l’homme religieux propre juste par excellence, et un publicain, homme dont la mauvaise réputation est notoire.

S’appuyant sur le sentiment de satisfaction qui l’habite à l’égard de la justice, le pharisien se présente à Dieu fort de sa valeur et de ses certitudes. Qu’il regarde sa vie au travers du volet de ce qu’il ne fait pas ou de ce qu’il fait, il ne trouve rien qui puisse le condamner. Si quelqu’un, dans son comportement, se conforme aux standards de la justice, c’est Lui. Il peut donc en toute assurance se présenter devant Dieu : comment Celui-ci ne l’accueillerait-Il pas ?

Si le pharisien a quelques raisons d’être satisfait de lui, sans s’en rendre compte, il fait défaut à l’égard de la justice, telle que Dieu la conçoit, sur au moins deux points. Le premier est qu’il ne réalise pas à quel point, malgré la bonne note qu’il attribue à sa conduite, il est encore loin de la perfection exigée par Dieu. Quoi qu’il pense, il faut que le pharisien le sache : avoir une conduite au-dessus de la moyenne des gens ne suffit pas et ne suffira jamais pour être juste aux yeux de Dieu. Dieu étant parfait, seule la perfection répond aux exigences de Dieu dans ce domaine. Or, le pharisien, si fier soit-il de ses œuvres et de sa moralité, ne l’est pas. Preuve en est par le second point par lequel il pèche : son orgueil et le mépris dont il fait preuve à l’égard du publicain qui, à côté de lui, se présente aussi à Dieu pour prier.

Si le pharisien peut s’enorgueillir de se présenter devant Dieu avec une offrande de choses qui lui paraissent honorables, tel n’est pas le cas du publicain. Non seulement les mains avec lesquelles il prie sont vides, mais, de plus, elles sont sales. La seule chose dont il puisse parler avec Dieu, en accord avec son cœur, est son péché. A la vue des deux hommes qui se présentent à Dieu, Jésus conclura, contre toute attente humaine logique, que celui qui repartira justifié n’est pas le pharisien, mais le publicain.

La conclusion de Jésus amène plusieurs réflexions sur ce qui compose la notion de justice de Dieu. La première est que la justice de Dieu s’appuie sur la vérité. Dès qu’un homme se présente devant Dieu sur la base de la vérité quant à lui-même, il se trouve dans les dispositions lui permettant d’être entendu par Dieu. La seconde est que la justice dont un homme peut être gratifié devant Dieu ne peut et ne pourra jamais venir de lui. Un homme ne peut être juste : il ne peut être que justifié par le don de la grâce de Dieu !

Que toujours cette certitude et cette condition de la vérité habitent nos cœurs lorsque, désireux de prier, nous nous approchons de Dieu !

lundi 16 août 2010

Chapitre 18, versets 1 à 8



Parabole sur la prière

Dans la suite des choses essentielles qu’Il veut transmettre à Ses disciples, Jésus passe ici à l’un des composants essentiels de la vie chrétienne, vie qui est une relation de cœur à cœur personnelle avec Dieu. La parabole étant, dans la bouche de Jésus, l’outil qu’Il privilégie pour transmettre les points d’enseignement qu’Il veut faire comprendre, c’est par elle qu’ici encore Il va communiquer l’encouragement que Ses disciples ont besoin d’entendre sur ce composant si central qu’est la prière et sa pratique pour un disciple.

Si la prière reste un sujet mystérieux qui suscite mille interrogations, l’intention ciblée de Jésus nous est, dès le début, présentée. Le but de Jésus, dit Luc, est d’encourager les disciples à ne pas avoir peur de persévérer dans les demandes qu’ils formulent à Dieu dans la prière. Qu’un homme de Dieu, ancré dans l’expérience, nous le dise est déjà un profond stimulant pour nous. Venant de la bouche de Jésus, un tel propos devient, plus qu’un appui, un commandement.

Comme c’est souvent le cas, Jésus va une fois de plus se plaire à mettre en scène un contexte et des personnages dotés de traits de caractère extrêmes afin, par contraste, d’illustrer ce qu’Il veut susciter chez Ses disciples :

1. le 1er personnage : un juge sans coeur

Il est, en tant que juge, celui auquel, en tant que représentant de sa profession, tout justiciable aimerait le moins avoir à faire. Dépourvu de toute conscience et de toute sensibilité à l’égard d’autrui, Jésus le présente comme un homme duquel il ne faut attendre ni faveur, ni compassion. La question se pose donc : comment fléchir le cœur d’un tel juge pour obtenir auprès de lui gain de cause et réparation pour un préjudice subi. La réponse nous vient par le second personnage.

2.  le 2ème personnage : une veuve spoliée

Victime d’un adversaire qui, sans doute, a profité de sa faiblesse pour l’extorquer, Jésus la présente comme la personne la plus dépourvue d’atout pour obliger le juge à prendre en considération sa requête. Si elle ne peut compter sur aucune soutien, ni exercer aucun pouvoir d’influence, la veuve possède un atout contre lequel peu de personnes ont la capacité de résister longtemps : l’importunité. La pauvre veuve, qui n’a rien à perdre, l’a décidé : quitte à harceler le juge jour et nuit, elle ne lâchera pas le morceau jusqu’à ce qu’elle ait obtenu gain de cause. Sa persévérance va être payante. Si le juge va céder, ce n’est en rien, précise Jésus, à cause des qualités de cœur soudaines dont il aurait fait preuve, mais pour une seule raison : par capitulation face à l’acharnement de la veuve.

Si Dieu est aussi un juge, le but de Jésus est de montrer que Ses dispositions ne sont en rien comparables à celles de celui qui nous est présenté ici. Le juge de la parabole nous est montré comme quelqu’un de qui les justiciables s’approchent en sachant d’avance qu’il n’est pas homme à exaucer et comprendre. La problématique du plaignant qui va vers ce juge se résume donc à une seule chose : vu que la réponse à sa demande ne repose que sur lui, c’est à lui de trouver les moyens d’arracher la décision du juge en sa faveur.

Notre situation dans la prière, veut montrer Jésus, est à l’opposé de celle-ci. Le cœur du Juge céleste auprès de qui nous nous approchons est un cœur pétri l'amour de la justice. Aussi c’est avec une oreille attentive qu’Il entend les plaintes et reçoit les demandes de ceux qui, membres de Son royaume, font appel à Lui pour la défense de leur cause. La problématique qui se pose ici n’est pas celle que l’on trouve dans la parabole. Le juge n’est pas à convaincre. Des épaules du plaignant, la problématique de l’exaucement passe à celles du Juge, confronté à une difficulté d’un tout autre ordre, en termes de sens, que celle que l’on trouve dans la parabole : le Juge est prêt à répondre aux plaignants qui s’adressent à Lui ! Mais trouvera-t-Il en eux suffisamment de foi pour s’attendre à Lui jusqu’à la réponse ? La balle n’est plus du côté du juge, elle est du nôtre !

jeudi 12 août 2010

Chapitre 17, versets 22 à 37

Le jour du Fils de l’homme

Si, dans sa phase actuelle, le royaume de Dieu se fait discret et n’est visible pour ceux qui le cherchent qu’au regard de la foi, viendra, annonce Jésus, un jour qui sera le jour du Fils de l’homme. L’expression choisie ici pour traiter ce sujet ne relève pas du hasard. L’annonce prophétique du jour du Fils de l’homme, jour préfigurant le renouvellement de toutes choses : Mat 19,28, n’est pas une nouveauté. Elle fait référence à quelque chose de connu et d’attendu par tous les juifs de tout temps : la venue et la manifestation du Messie en gloire annoncée par les prophètes anciens, Daniel en particulier : Daniel 7,13. Pour l’heure, c’est aux disciples seuls, qui L’ont reconnu comme tel : Mat 16,16, que Jésus, appliquant la prophétie au jour futur de Sa venue, peut parler avec liberté de l’événement. Pour L’avoir fait dans un autre cadre, celui de Son procès et de Sa comparution devant le sanhédrin, malheur, pourrait-on dire, Lui en adviendra. L’appropriation à Sa personne du titre du Fils de l’homme attendu passera aux yeux des juifs comme le blasphème absolu, un crime qui ne pouvait être sanctionné que d’une seule manière : la mort : Mat 26,64 à 66.

Cette heure n’étant pas encore venue, Jésus va anticiper l’événement en donnant aux disciples quelques indications et recommandations destinées à les préparer à vivre dans les meilleures conditions l’attente de ce jour :

1ère indication : le jour du Fils de l’homme se produira à une époque de forte pression et confusion. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, Jésus semble suggérer que la venue de ce jour, à cause de l’époque, sera, en tout cas dans certains milieux, l’objet de grandes spéculations. De multiples théories et prophéties verront le jour, toutes plus fausses les unes que les autres, mettant les croyants trop naïfs en danger d’être séduits, trompés et entraînés, derrière des gourous, dans toutes sortes d’erreurs. Jésus le rappelle : le retour du Fils de l’homme, comme l’éclair dans le ciel, s’imposera de telle manière qu’il n’y aura aucune ambiguïté pour personne sur ce qui se produira. Mais, avant, ce jour, Jésus le rappelle aux Siens qui n’y sont pas davantage préparés, il faut qu’Il souffre beaucoup et soit rejeté par leur génération.

2ème indication : si la venue du Fils de l’homme se produira à une période de forte agitation spirituelle dans certains milieux, l’époque sera aussi marquée, comme il en fut au temps de Noé et de Loth, par une profonde insouciance généralisée. Tous les centres d’intérêt de la majorité des gens, dit Jésus, tourneront autour du manger, du boire, du bonheur présent, de l’argent ou du commerce. La dimension spirituelle des êtres sera effacée au profit d’une conception de plus en plus athée, hédoniste et matérialiste de la vie. Si certains spéculent sur lui, le jour du Fils de l’homme sera, pour la plupart, comme le fut le déluge et la destruction de Sodome, une surprise totale ! Citant l’exemple de la femme de Loth laissée en arrière : Genèse 19,26, Jésus avertit Ses disciples : le plus grand danger qui les guette dans l’attente de ce jour est celui de l’attachement de leur cœur aux choses d’ici-bas. Etre prêt pour le jour du Fils de l’homme, c’est être libre de toute attache !

3ème indication : le jour du Fils de l’homme sera le jour de la séparation irréversible de l’humanité en deux camps distincts : le camp de ceux qui rejoindront le Christ dans la gloire, et celui de ceux qui resteront ici-bas. Allusion est faite ici à l’enlèvement des croyants, doctrine que l’apôtre Paul, sous l’inspiration de l’Esprit, explicitera plus en détail plus tard : 1 Thes 4,13 à 5 ,3.


Que Dieu nous donne d’être trouvé fidèles et comptés parmi les ravis !

mercredi 11 août 2010

Chapitre 17,versets 20 à 21

Le règne de Dieu dans sa phase actuelle

La venue du royaume de Dieu étant une constante du discours de Jésus, les pharisiens Lui demandèrent quand ce royaume, dont Il atteste l’imminence, viendrait. Car, si le royaume vient, pensent les pharisiens, il est impossible de ne pas le reconnaître, tant, de manière évidente, il se différenciera de tout ce qu’on aura vu et connu avant ou en-dehors de lui.

La réponse de Jésus à la question légitime des pharisiens suit la droite ligne du choix qui a été celui de Dieu de l’incarnation : l’envoi de Son Messie sous la forme commune d’un homme. Si le royaume de Dieu se différencie dans sa nature de tous les autres royaumes existants, Jésus précise ici cependant que ce n’est pas sous la forme d’un phénomène localisé et de grande ampleur qu’il faut attendre sa venue. Dans sa phase actuelle, dit Jésus aux pharisiens, le royaume de Dieu se montre là où, de manière évidente, les œuvres de Dieu se manifestent au milieu des hommes. S’ils veulent bien les ouvrir, les pharisiens, suggère Jésus, ont sous leurs yeux dès maintenant, à travers Lui, la manifestation de ce royaume, comme l’admettra l’un d’entre eux, Nicodème, venu voir Jésus en privé une nuit : Jean 3,2. Certes, un jour, dont Jésus va parler à Ses disciples, le royaume de Dieu s’imposera dans toute sa gloire et sa puissance. Mais le commencement de la manifestation de ce royaume se fera, comme le prophète Daniel l’a annoncé : Dan 2,34-35.44, dans la discrétion, afin que seuls ceux qui l’attendent vraiment puissent, derrière la faiblesse des apparences, le discerner : cf Luc 2,29 à 32.

La réponse de Jésus, qui dénie au royaume de Dieu dans sa phase actuelle un emplacement géographique qui le rendrait observable à partir d’un lieu, est, pour l’époque, proprement révolutionnaire. Pour tous les Juifs (et même pour les samaritains), il est, en effet, impensable de séparer présence de Dieu et accès à cette présence à un lieu donné : le temple : Jean 4,20. Pourtant abolie par Jésus, cette nécessité d’un lieu géographique précis ressuscitera à maintes reprises dans l’histoire comme une exigence incontournable des religions dans leur besoin d’asseoir leur pouvoir. Comme le temple pour les juifs à Jérusalem, la chrétienté aura son Vatican à Rome, les musulmans leur Kaaba à la Mecque, les protestants, leur ville phare, un temps, à Genève… Jésus le dit pour nous encore aujourd’hui : prenons garde de ne pas lier le royaume de Dieu à un lieu précis. Aucun bâtiment, aucun endroit n'est un passage obligé pour accéder au royaume de Dieu. Ce que Dieu cherche, ce sont, dira-t-il à la samaritaine, des adorateurs qui, en tout lieu, l'adorent en esprit et en vérité ! Que nous soyons de ceux-là !

mardi 10 août 2010

Chapitre 17, versets 11 à 19

Guérison de dix lépreux :

C’est une constante chez Jésus d’ordonner aux lépreux qui font appel à Lui et à Sa compassion de se rendre chez le prêtre, soit pour rendre témoignage de leurs guérisons : Mat 8,4, soit pour la connaître comme ici en cours de route. Le souci de Jésus, au travers de cette démarche imposée, est d’ordre didactique. S’Il guérit de Sa propre autorité ceux qui viennent vers Lui, Jésus tient à témoigner à ceux de Sa nation du fait que Son action s’inscrit, non en marge, mais bien dans le cadre et le respect de la loi. Or la loi exige que ce soit le prêtre qui, en vue de la réintégration des malades dans la communauté, atteste de la guérison du lépreux : Lév 14,1 à 22. L’exigence de Jésus ordonnant aux lépreux de se plier à cette règle protocolaire donnée par Dieu poursuit ainsi un triple but :

- elle est un témoignage du fait que Jésus est un vrai Juif respectueux de la loi

- elle est une exigence de sagesse destinée à ouvrir le chemin d’un avenir communautaire aux lépreux jusqu’alors bannis de la société

- elle est, surtout, un témoignage puissant donné aux prêtres de Sa messianité. Car qui, mis à part Dieu, a le pouvoir de guérir radicalement et instantanément un lépreux de sa lèpre ?

Si l’ordre donné aux lépreux poursuit ces objectifs, ce qui causera l’étonnement de Jésus est ce qui se produira par la suite. Car le miracle attendu, espéré par les dix lépreux, s’opérera. Avant même qu’ils aient trouvé le prêtre, les dix, sur le chemin, soudain, se verront guéris. Unis dans la douleur et dans leur démarche de foi envers Jésus, les lépreux, comme cela se produit souvent, se diviseront, une fois le gain espéré obtenu, dans leurs réactions. Sur les dix, ce ne sera pas la moitié, ni un tiers, mais un seul d’entre eux, un Samaritain, le seul non juif de la troupe, qui aura le réflexe légitime, sensé, de revenir sur ses pas pour témoigner de sa reconnaissance profonde à son bienfaiteur.


La réaction du lépreux samaritain, saluée et approuvée par Jésus, est riche de sens. Elle témoigne du fait que, si la soumission à la loi est toujours la norme requise par Christ pour notre comportement, le fait d’être l’objet de la grâce engendre des conduites qui dépassent en qualité, puis en expérience, ce que la simple conformité à la loi suscite. Révélation fulgurante de l’immense amour de Dieu pour nous, la grâce confère à celui qui en est l’objet la liberté d’un anticonformisme mélangé à un puissant désir de dévotion que seule, en retour de la grâce reçue, l’adoration peut susciter. A la vue du seul samaritain revenu vers Lui pour la Lui exprimer, Jésus pose les bonnes questions. La loi a-t-elle donc tellement enfermé les Juifs dans ses règles qu’elle en a rendu prisonnier leur cœur ? N’y aura-t-il donc que des pécheurs ou des étrangers pour apprécier à Sa juste valeur le don de la grâce de Dieu ? Vingt siècles après la question reste posée, tant il s’avère difficile de toucher ceux qui croient en la valeur de leur obéissance à la loi, par le message pourtant si bouleversant de la grâce de Dieu ! Problème : le salut, comme seul le samaritain en fera l’expérience, ne dépend pas de l’obéissance à la loi, mais de l’accueil de la grâce de Dieu, et de son Donateur, dans sa vie !

lundi 9 août 2010

Chapitre 17, versets 1 à 10 (2)

3ème point : la foi : v 5 et 6

A la genèse de notre relation avec Dieu, la foi reste dans notre marche avec Lui le moyen par lequel nous nous approprions les richesses qu’Il tient à notre disposition. Aussi comprenons-nous bien la demande des disciples de Jésus à son sujet. Si tant de choses dépendent dans notre vie de la foi, ne courrons-nous pas le risque, par manque de foi, de nous en priver ?

L’inquiétude des disciples, montre Jésus, n’est pas fondée. Si la foi est effectivement le moyen que Dieu nous a donné pour vivre notre relation avec Lui, ce n’est pas de la grandeur de la foi que dépend la capacité de Dieu à réaliser les œuvres qu’Il a en vue d’accomplir à travers nous. Le penser serait à la fois surévaluer la valeur de la foi et, surtout, faire dépendre de manière trop forte l’œuvre de Dieu des dispositions de l’homme. Dieu ne nous demande pas d’avoir une grande foi. Ce qu’Il attend de nous est que, Le connaissant, nous ayons la foi pour croire que ce qu’Il dit, Il peut l'accomplir : Rom 4,18. Aussi le combat de la foi ne consiste-t-il pas à la cultiver, à la manière de l’athlète pour ses muscles, pour être à la hauteur des défis qui se présenteraient à nous. Il est plutôt, comme le fera David face à Goliath, de rester avec calme et tranquillité sur le terrain des certitudes que nous donne la connaissance de Dieu et de Ses promesses, et d’interdire à nos cœurs toute emprise du doute dû au regard qui se porte sur autre chose que Lui. La foi est davantage une position à défendre qu’une forteresse à conquérir. En Christ, nous sommes l’objet de toute la grâce de Dieu : ce qui signifie que toutes les promesses que Dieu nous a faites en Lui sont pour nous Oui et Amen : 2 Cor 1,20. Tel est le langage de la foi selon Dieu : la foi regarde, non à ses possibilités, mais à celles de Dieu et de Christ pour accomplir les exploits impossibles qui lui sont proposés : Rom 10,6-8.

4ème point : le caractère non méritoire du service : v 7 à 10

Le dernier point sur lequel Jésus instruit ici Ses disciples porte sur le caractère non méritoire de leur service. S’il y a bien une aspiration qui existe dans le cœur de l’homme, c’est celle du besoin de la reconnaissance. Ayant perdu, depuis la chute, la notion de la grâce, nous vivons tous selon le principe religieux qui dit que toute bonne action que nous faisons mérite sa récompense. Jésus nous appelle ici à changer de paradygme. Si la récompense existe dans la pensée de Dieu : cf 1 Cor 3,10 à 15, nous devons, en tant que Ses disciples, dit Jésus, nous refuser de vivre dans l’esprit de celle-ci, comme si elle était un dû ! Les récompenses, la gratification dont nous pouvons être l’objet ici-bas pour notre service ne sont, une fois de plus, que des cadeaux de la grâce de Dieu, jamais le paiement mérité de notre dépense pour le bien. Penser autrement serait oublier une vérité que Jésus rappelle ici : faire le bien pour nous, en tant que serviteurs de Dieu, ne devrait pas être un acte qui relève de l’exception, mais une constante qui relève de la normalité !

Que Dieu nous aide à nous souvenir qu’en Le servant et en faisant le bien, nous avons juste fait ce qui devait être fait, rien de plus !

samedi 7 août 2010

Chapitre 17, versets 1 à 10 (1)

Enseignement de Jésus à Ses disciples :

Après le thème de la richesse, Jésus poursuit ici l’enseignement qu’Il donne à Ses disciples sur 4 autres points pratiques relatifs à leur marche avec Dieu :

1er point : la vigilance quant à eux-mêmes

Jésus nous connaît. Devant l’enthousiasme de ceux qui étaient subjugués par les miracles qu’Il opérait, Jean nous dit que Jésus restait lucide : Il ne se fiait pas à leur engouement pour Lui, sachant à quel point l’homme peut être changeant, versatile : Jean 2,25. Cette inconstance qui caractérise les humains n’est pas l’apanage des seuls incroyants. Il l’est aussi des croyants dans leur relation avec Dieu.

La 1ère exhortation que Jésus lance ici est un appel à la vigilance quant à soi-même. Pour que nous en comprenions toute la nécessité, Jésus rappelle à Ses disciples le caractère organique de leur foi. Nous faisons partie, en tant que chrétiens et disciples du Christ, d’un corps, d’une communauté aux liens forts, dans laquelle tout ce que vit l’un rejaillit obligatoirement sur l’autre. Nous sommes chacun comme des épis de blé serrés, aux racines entremêlées dans un champ : cf Mat 13,29. Aucun de ceux qui vit pour Christ ne vit seul sa vie chrétienne. Il la vit avec et devant les autres, les touchant inévitablement en bien ou en mal par le modèle qu’il leur donne ! Jésus nous avertit donc sur la nécessité de la vigilance. Car si nous sommes appelés un jour à rendre compte à Dieu de l’intendance de notre vie avec Lui, sera compté dans cette évaluation aussi bien les bienfaits apportés que les dégâts occasionnés dans celles d’autrui. Dans ce cadre là, avertit Jésus, mieux vaudrait, pour celui qui aura été cause de chute, de péché ou d’égarement pour un petit (un enfant, un faible, un néophyte…) dans la foi, être exécuté physiquement plutôt que de subir la réprobation divine qui l’attend !

2ème point : le pardon

Si la réprobation la plus extrême est le lot qui attend celui qui aura été cause de chute pour autrui, Jésus appelle Ses disciples, à contrario, à faire preuve à outrance d’une capacité de pardon envers quiconque s’humilie devant eux, reconnaît le caractère coupable de son comportement et dit vouloir s’en amender. Dans la même ligne que l’exhortation précédente, Jésus nous avertit ici du danger que représente la frilosité, le soupçon ou la réserve dont nous pourrions faire preuve à l’égard de celui qui réclame notre indulgence pour sa faute. L’amour, dira plus tard l’apôtre Paul, croit tout ne soupçonne pas le mal : 1 Cor 13,7.

S’il est légitime d’attendre dans la vie de celui qui se repent des preuves visibles de son changement d’attitude et de conduite : cf Luc 3,8, Jésus exhorte ici Ses disciples à ne pas lier leurs dispositions au pardon à ces fruits attendus. Le pardon est une chose, la réforme de la conduite en est une autre. Le pardon est du ressort de la responsabilité des disciples et de la communauté. La réforme l’est de celui qui dit regretter et vouloir changer sa conduite passée. Le premier est nécessaire en ce que, plus que quoi que ce soit d’autre, il oblige l’autre. Preuve d’amour et de confiance envers l’autre, le pardon stimule le coupable à prendre désormais ses responsabilités et à ne pas décevoir. Faisons donc grâce, comme Dieu nous a fait grâce en Christ ! Et soyons conscients que les changements attendus ne se produiront peut-être pas aussi vite qu’espérés, comme il en est aussi souvent dans nos vies devant Dieu !

vendredi 6 août 2010

Chapitre 16, versets 19 à 31 (3)

1ère réponse d’Abraham à la prière du riche :

Le riche ayant prié Abraham, Jésus le fait répondre à la demande pressante de compassion que celui-ci lui a adressé. Si un tel dialogue a lieu dans l’histoire que Jésus raconte, nous ne devons pas penser qu’il existe en réalité. Ce dialogue existe pour qu’une fois pour toutes, morts comme vivants, nous sachions et comprenions pour quelles raisons la rétribution qui attend les perdus est ce qu’elle est : une souffrance à la fois intense et irréversible.

La réponse d’Abraham à la prière du riche tient en deux points :

- le 1er est une justification de la raison de la souffrance que le riche éprouve. Abraham renvoie le riche à ce qu’a été sa vie ici-bas et aux choix qui l’ont présidée. Il lui explique ainsi qu’une loi unique préside à notre destinée : notre éternité ne sera pas quelque chose de neuf, mais la récolte, la moisson de ce qu’ici-bas, nous aurons semé. Si toute notre vie sur terre était centrée sur le fait d’y trouver ici et maintenant la satisfaction, c’est ici et maintenant que nous la connaîtrons. Le riche ne doit donc pas s’étonner de ne rien recevoir ou récolter dans l’au-delà : il n’a rien semé, ni préparé dans ce but. Par le rappel au souvenir de ce qu’a été la vie du riche, Jésus nous révèle aussi ce qui sera la principale cause de tourments des damnés : la mémoire de leurs fautes et de leurs choix. Si Dieu, par Sa grâce, ne se souvient plus de nos péchés, les damnés, quant à eux, ne les oublieront jamais !

- Le second est une mise au point. Aussi ardente soit la prière du riche dans le séjour des morts, il est impossible à Lazare d’y répondre. La situation du riche comme celle de Lazare, dans les lieux où il se trouve, est définitivement fixée. La séparation qui a existé du vivant des deux, entre le monde dans lequel vivait le riche et celui dans lequel vivait Lazare, est définitivement entérinée. Quand bien même il le désirerait, Lazare ne pourrait porter secours au riche, et le riche quitter son lieu de tourment. Inutiles sont tous les efforts entrepris de la terre pour changer la condition de ceux qui, avant nous, sont partis vers l’au-delà : il est, dit l’Ecriture, réservé aux hommes de mourir une seule fois après quoi vient le jugement : Hébreux 9,27.

Suite et fin du dialogue :

Réalisant le malheur qui le frappe et dont, ici-bas, il n’avait pas eu, selon lui, assez conscience, le riche adresse une seconde demande à Abraham pour les 5 frères qui lui restent afin, qu’au moins, eux ne viennent pas le rejoindre dans ce lieu de tourments. Etonnant de voir comment, à la lumière de l’éternité, les vraies priorités s’ordonnent. Alors qu’ici-bas il ne se souciait aucunement de son âme, voilà soudain que le riche se découvre dans l’au-delà une mission d’évangéliste, nous révélant par là même, si l’on devait établir un ordre de priorité, quelle est l’activité le plus urgente à laquelle les hommes devraient sur terre se donner.

Comme la précédente, la requête du riche, qui était que Lazare soit envoyé du ciel pour témoigner à ses frères de l’urgence pour eux de se préparer à l’éternité, n’est pas reçue. Si ici-bas, toutes nos prières peuvent être entendues, Jésus montre ici qu’aucune de celles que pourront adresser les damnés ne le sera. C’est avant notre mort qu’il nous faut prier et demander à Dieu d’exercer Sa grâce pour nos vies ou celles des autres. Après il est trop tard !

La raison du refus de l’exaucement de la demande du riche n’est cependant pas qu’affaire de principe. Elle tient à une réalité : c’est le fait que les frères du riche ont, selon Abraham, déjà à leur disposition tout ce qui leur est nécessaire pour savoir ce qu’il en est pour leur avenir éternel. Car eux aussi sont, comme le riche, des enfants d’Abraham, des juifs, peuple qui, depuis toujours, est au bénéfice de la Révélation de Dieu, du témoignage de la Loi et des Prophètes : cf Rom 3,1-2 ; 9,4-5. Abraham l’atteste avec une totale certitude : s’ils n’écoutent pas le témoignage que Dieu a rendu de Lui-même dans Sa Parole, témoignage qui a traversé les siècles, ils ne se laisseront pas davantage persuader quand bien même quelqu’un reviendrait des morts pour leur parler !

Conclusion :

A la lumière de la fin du dialogue fictif que Jésus a établi entre Abraham et le riche, deux conclusions s’imposent à nous, croyants :

- la 1ère, déjà soulignée, est que rien n’est plus urgent pour nous dans ce monde que le fait d’être des évangélistes, des témoins actifs de la Bonne Nouvelle. S’il y a une chose que le riche aurait aimé faire, si la possibilité lui était donné de revenir sur terre, c’est de s’acquitter de cette mission auprès des vivants. Croyons bien aujourd’hui que si un Gainsbourg ou un Coluche revenaient ici-bas, ils ne nous parleraient avec insistance que d’une seule chose : l’urgence de se réconcilier avec Dieu !

- la seconde est que la Bible, la Parole de Dieu, est le moyen par excellence que Dieu nous a donné pour croire à la Bonne Nouvelle. La foi, dira Paul, vient de ce que l’on entend et ce que l’on entend de la parole du Christ : Rom 10,17.

Allons donc et, par la force que Dieu nous donne, témoignons ! Nous ne serons jamais plus au centre de la volonté de Dieu qu’en faisant cela !

jeudi 5 août 2010

Chapitre 16, versets 19 à 31 (2)

3. la mort : suite et fin

Arrive pour Lazare comme pour le riche (la richesse n’est ici d’aucun secours) le moment inéluctable de la mort. Jusque dans la mort, l’inégalité qui a marqué la vie de Lazare et du riche continue. Il est à noter que c’est Lazare, sans doute usé et prématurément vieilli par la dureté de la vie, qui mourra le premier. On le sait tous : l’espérance de vie est toujours plus grande pour les habitants des pays riches que pour ceux des pays pauvres. Nul doute aussi que la cérémonie d’enterrement des deux hommes fut fort différente. Que n’a-t-on pas dit et que n’a-t-on pas fait pour le départ du riche : homme prospère, qui a réussi, qui a tant fait profiter de sa richesse à ses amis… En silence, dans l’indifférence la plus complète, le pauvre est parti. Il a quitté la société des hommes de la même manière qu’il a vécu au milieu d’elle : dans l’inexistence la plus totale. Vient alors la suite…

La porte du tombeau à peine fermée que déjà s’ouvre pour chacun celle de l’au-delà. Tout soudainement s’inverse. Le riche qui était dans le confort et l’aisance connaît le tourment et la souffrance. Le pauvre qui passa son temps ici bas à souffrir est maintenant consolé. Lazare étant comblé, Jésus donne la parole au riche. S’il y a quelqu’un de qui les vivants, pour acquérir bon sens, sagesse et intelligence, peuvent apprendre, c’est bien de celui qui, parti avant eux, a raté son passage dans l’au-delà. N’ayant que ce texte dans la Bible pour nous en parler de manière aussi explicite, il revêt pour nous qui sommes encore ici-bas, une importance accrue ! Ecoutons donc avec attention la parole du riche, message venant de l’au-delà servant d’avertissement à nous qui n’y sommes point encore !

a. 1ère surprise : le riche fait l’expérience que, bien que mort, il ne l’est pas. Il vit toujours. Il peut voir, sentir, parler. Il est conscient et en pleine possession de ses moyens. Il sait qui il est et se souvient avec exactitude de toute sa vie passée. Nul doute que cette surprise sera la première et la plus grande de tous ceux qui, athées, se réveilleront, après leur mort, aussi vivants, si ce n’est plus, qu’avant !

b. 1ère constatation : le riche et Lazare, comme il en fut du temps de leur vivant, ne sont pas dans le même lieu. Tandis que Lazare est dans le sein d’Abraham, vers lequel il a été porté par une cohorte d’anges, le riche est dans le séjour des morts, en attente de son jugement.

c. Seconde surprise : le riche voit Lazare dont il se rappelle. Alors que, sur terre, il n’avait fait de lui aucun cas, il lui porte soudainement une grande attention. Dans son malheur, il a la chance de connaître quelqu’un qui est dans le séjour des bienheureux. Peut-être peut-il faire quelque chose pour lui !

d. Seconde constatation : pour la première fois de sa vie, le riche se met à prier. Lui qui n’en a jamais fait preuve durant toute sa vie terrestre envers Lazare, il demande qu’on ait compassion de lui et que Lazare lui soit envoyé pour le soulager dans ses souffrances !

Si quelqu’un venait à douter de la réalité de la souffrance des perdus, le contenu de la demande du riche devrait suffire à elle seule pour le convaincre de la réalité de son acuité. Le riche demande que Lazare lui apporte ce qui, ici-bas, est pour nous la chose la plus vitale et la plus courante : de l’eau. Oui ! Jésus l’atteste ici sans ambiguïté : l’enfer avec ses flammes dévorantes, sa souffrance insupportable, ses remords et ses tourments existent bien ; et rien n’est prévu dans ce lieu pour qu’ils soient soulagés ! La leçon de l’histoire aboutit, dans le cadre du sujet de la richesse, à une terrible conclusion : mieux vaut, dit en quelque sorte Jésus, mendier du pain sur terre et finir au ciel que de mendier de l’eau en enfer après avoir été riche sur terre.

Suite à venir...

mercredi 4 août 2010

Chapitre 16, versets 19 à 31 (1)

Le riche et Lazare


Toujours dans le cadre du sujet de la richesse, Jésus poursuivit en racontant l’histoire de deux hommes que, déjà ici-bas, tout sépare, et qu’un destin tout aussi différent que ne furent leur parcours et leur condition ici-bas attend dans l’au-delà.

1. le 1er homme :

Il est, selon le regard qu’en porte Jésus, le riche par excellence. Tout son comportement illustre pour Jésus les priorités et les attitudes de celui que la richesse, le dieu Mamon, domine. Celui que la richesse possède, montre Jésus, ne vit que pour une seule chose : tirer au maximum profit, jouissance pour lui-même et pour le temps présent de ce qu’elle lui permet d’acquérir. Car tel est le pouvoir de la richesse, qu’elle permet, en même temps qu’elle les révèle, de satisfaire toutes les envies et tous les désirs du cœur : bonne chère, plaisir, vie dispendieuse dans le luxe et le clinquant… Si tel est l’endroit du tableau de la richesse, Jésus prévient que celui-ci comporte inévitablement un envers. Il est impossible, dit en quelque sorte Jésus, d’engraisser sa chair sans, en contrepartie, rendre insensible son esprit. Aussi généreux soit-il avec lui-même, aussi avare, montre Jésus, est le riche avec les autres, et plus particulièrement avec ceux qui, tel Lazare, sont les nécessiteux qui sont à sa porte. Aussi soucieux est-il de satisfaire les moindres désirs de sa personne, plus insensible que des chiens se montre-t-il, en terme de compassion, face aux besoins vitaux des autres. Aussi préoccupé se révèle-t-il de jouir dans le temps présent, aussi aveugle paraît-il face à l’échéance inéluctable de sa fin et du jugement de Dieu qui s’ensuivra. Tel est le riche dans tous ses traits et ses défauts.

2. le 2ème homme :

Contrairement au riche, Jésus nous donne son nom : Lazare. Ce détail n’est pas sans importance. Il revêt une double signification :

- par sa signification d’abord : Lazare signifie « Mon aide vient de Dieu ». A l’opposé du riche non-croyant, Lazare est pour nous l’incarnation du vrai croyant, pauvre pour ce monde, mais riche dans son espérance et sa foi en Dieu.

- par la relation qui le lie à Dieu. Si le riche n’est pas connu de Dieu, le pauvre l’est. Dieu ne sait pas qui est le riche : Il n’a pas de relation personnelle avec lui. Il sait par contre qui est Lazare. Son nom lui est connu parce qu’il fait partie du cercle de Ses relations.

La condition du pauvre nous est ici décrite à l’extrême opposé de celle du riche. Contrairement au riche qui peut satisfaire tous ses désirs et vivre dans le superflu, toute la préoccupation du pauvre tourne autour de la survie et de ses besoins vitaux. Bien qu’étant proches physiquement l’un de l’autre, Lazare et le riche vivent, à l’intérieur d’eux-mêmes sur deux planètes totalement séparées l’une de l’autre. Rien de ce qui préoccupe chaque jour le riche, ne préoccupe Lazare dans le quotidien. Penser à ce que le riche pense est, plus qu’inconcevable pour lui, inexistant. Que sait, en effet, Lazare d’habits riches et somptueux, lui qui n’est vêtu que de loques ? Que sait-il de la chaleur d’une maison confortable, pleine d’amis, lui qui, exposé aux vents et aux intempéries, vit sous un porche et n’a pour compagnie que des chiens errants ? Que sait-il d’un corps replet, reluisant de graisse, lui que tourmente chaque jour ulcères et plaies variqueuses ?

La même remarque, au sujet de l’endroit des deux tableaux, s’applique cependant à leur envers. Alors que les préoccupations spirituelles sont inexistantes dans le champ des pensées du riche, elles occupent pourrait-on dire, tout l’espace ou presque de celui de Lazare. Si la richesse a l’avantage de permettre à celui qui la possède d’acquérir tout ce qu’il souhaite pour son plaisir, la pauvreté possède en elle-même aussi ses atouts. Là où la richesse ferme le cœur, la pauvreté l’ouvre. Placé dans les faits face à la vanité, le non-sens, la dureté de la vie, la pauvreté invite le pauvre à sortir de lui-même pour chercher en Dieu, et non en lui-même ou dans les choses de la vie, son espérance. Tel fut Lazare qui, contrairement au riche, était, par l’obligation due à sa pauvreté, au cœur des questions essentielles.

Sans doute l’exemple pris ici par Jésus touche-t-il à des extrêmes. Connaissait-Il des cas similaires ou a-t-Il inventé l’histoire de A à Z. Le bon sens nous fait pencher pour le fait que ce que Jésus utilise ici pour mettre en évidence les vérités qu'il veut faire passer ne doit pas être si éloigné que cela de la réalité ! Dans son côté tragique concernant Lazare, l’histoire est aussi là pour témoigner d'un fait que, au seul regard de nos yeux et du jugement rapide que l’on pourrait porter sur la situation, l’on ne soupçonne pas. Ce fait est que, au sein de la plus extrême misère, peut s’épanouir la fleur de la foi et d’une vie personnelle avec Dieu. Alors qu’on pourrait penser le contraire (il est plus facile de croire en Dieu quant tout va bien), la parabole de Jésus met en évidence la réalité inverse. Tandis qu’aucune graine d’espérance ne germe sur la terre dure du cœur du riche, le cœur du pauvre se révèle être le terreau favorable pour qu'éclose la graine de la vie éternelle. Habitants de pays riches, vivant dans l’aisance et le superflu, nous sommes toujours surpris d’entendre des gens frappés par le malheur témoigner de leur amour et de leur espérance en Dieu (cf Haïti). La réponse à cet étrange paradoxe se trouve ici, dans le labour secret qu’a opéré la souffrance dans les cœurs.

Riche et pauvre : deux destins, dont l’un seul, est véritablement enviable. Dans cette vie, le riche a la faveur de tous. C’est au jour de la mort, jour où tous les compteurs des gains matériels sont mis à zéro chez chacun que se montre, en ce qui concerne la vie éternelle, qui est le gagnant et le perdant !

mardi 3 août 2010

Chapitre 16, versets 14 à 18

Loi et grâce


A l’écoute de l’enseignement de Jésus sur le rapport que doivent avoir Ses disciples avec l’argent, les pharisiens, dont l’un des péchés était de l’aimer, se mirent à tourner le Maître en dérision. Jésus saisit l’occasion de cette confrontation pour étendre l’enseignement qu’Il venait de donner à une question primordiale : la conception que l’on doit avoir de la place de la loi dans le cadre nouveau de la grâce qu’Il est venu inaugurer par l’Evangile.

Le sujet étant d’importance, Jésus ne pouvait le traiter sans que les pharisiens soient un tant soit peu prêts à L’écouter. Aussi commence-t-Il à l’aborder en les reprenant pour leur attitude sarcastique envers Lui. Il leur rappelle, à eux qui se veulent les champions de l’observance de la loi, que ce n’est pas sur la base des apparences que Dieu juge les hommes, mais sur ce qui se trouve effectivement dans leurs cœurs en termes de vérité de justice, de vérité ou d’honnêteté. S’ils prétendent craindre Dieu et Le vénérer, les pharisiens devraient apprendre à faire preuve de davantage de modestie et d’humilité. Ces choses dites, Jésus peut passer au sujet clé qui Le préoccupe.

L’objectif de Jésus dans Son propos sur la place de la loi dans le cadre de l’ère de la grâce est clair : Il veut prévenir. Confronté d’une part aux pharisiens, qui L’accusent de se faire trop facilement l’ami des pécheurs et des gens de mauvaise vie, d’autre part à la foule, qui ne cesse de Le presser pour recevoir de Lui quelque grâce, Jésus pourrait donner l’impression fausse que, à cause de la grâce dont Il est le porteur, la loi soit désormais caduque. Face aux pharisiens qui, à raison, plaçaient la loi au centre de leur relation avec Dieu et aux gens de mauvaise vie qui, à tort, seraient tentés de passer outre ses exigences pour forcer avec violence leur entrée dans le royaume de Dieu, il Lui est nécessaire de préciser les choses.

Jésus revient donc à Jean pour expliquer Son propos. Si, avec Jean, la seule condition exigée pour entrer dans le royaume de Dieu est la repentance, pour autant, précise Jésus, la loi n’a rien perdu de son actualité. Car le but de la repentance est de donner aux pécheurs l’accès à la grâce de Dieu, et le but de la grâce est d’amener le pécheur à vivre désormais selon l’esprit et les critères de la loi. La grâce de Dieu ne nous est pas uniquement donnée pour le pardon de nos fautes passées. Elle a comme objet ultime de nous insuffler la force de vivre à la hauteur des exigences que nous n’avons pu suivre sans elle. Ce serait donc se méprendre, dit en quelque sorte Jésus, de penser que, parce qu’Il est venu apporter aux hommes la grâce de Dieu, les exigences de la loi ne soient plus le niveau auquel Dieu désire que les hommes se réfèrent pour leur conduite. La loi est toujours en vigueur sous la grâce et, pour exemple, Jésus rappelle que les critères qui définissent ce qu’est un adultère aux yeux de Dieu restent les mêmes !

Le débat, ouvert ici par Jésus, ne manquera pas, par la suite, de faire couler beaucoup d’encre, entre autres, l’encre de plusieurs épîtres qui, dans le Nouveau Testament, traitent du sujet : Galates, Romains, mais aussi Jacques… Ce débat montre le danger du déséquilibre auquel nous sommes constamment exposés entre laxisme et légalisme. Seule une vie sous la direction de l’Esprit de Dieu nous garde des excès de l’un et de l’autre.

Que Dieu nous garde de faire de la grâce un prétexte pour vivre selon la chair. Qu’Il nous garde en même temps de juger trop rapidement quiconque ne semble pas, dans les apparences, s’aligner à nos références. C’est dans notre cœur d’abord que nous devons sanctifier notre Seigneur : 1 Pier 3,15.

lundi 2 août 2010

Chapitre 16, versets 9 à 13

L’argent : maître ou serviteur ?

La 1ère leçon que nous enseigne la parabole racontée par Jésus est que nous sommes, à l’égard de l’argent qui passe entre nos mains, non des propriétaires, mais des intendants. Cette définition que Jésus donne de notre statut à ce sujet est primordiale. Inévitablement, en effet, il apparaît que le fait d’être propriétaire de quelque chose crée un lien beaucoup plus fort avec la chose possédée que le fait d’en être un simple gérant. Par un curieux paradoxe, il s’ensuit que, plutôt que le gérant qui reste libre à l’égard des biens qu’il a sous son intendance, c’est le propriétaire qui est le plus exposé au risque de se trouver asservi aux biens qu’il possède.

Comme l’intendant de la parabole, gérant les biens de son maître, Jésus nous appelle ici quelque part à considérer l’argent qui passe entre nos mains comme un bien que Dieu nous appelle à gérer pour Lui. Car, comme Dieu l’a déjà dit ailleurs, or et argent Lui appartiennent d’abord : Aggée 2,8. Si nous sommes les intendants, le maître de la parabole est Dieu ! Or, Jésus le souligne ici à plusieurs reprises, de tous les biens que Dieu possède, l’argent est de loin le plus injuste. Il n’y a sur terre aucun argent qui ne soit réellement propre et qui, du début à la fin du circuit qu’il emprunte, ne soit entaché par quelque injustice. C’est donc avec grande prudence, et comme un bien qui risque de brûler les doigts de celui qui s’y attache, que Jésus nous invite à considérer l’argent.

Comment faire, en tant que disciple de Christ, pour tirer profit au maximum de l’argent, puissance mauvaise en elle-même, qui passe entre nos doigts ? A l’image de ce qu’a fait l’intendant avisé, Jésus nous indique ici la solution : utiliser ce matériau mauvais mais inévitable pour, avec lui, nous faire des amis. Puisque l’argent permet de tout acheter, dit en quelque sorte Jésus, utilisez-le dans ce monde comme un moyen de gagner l’estime, l’amitié, la considération d’autrui et lui permettre, à travers ce moyen, de connaître le Sauveur à qui vous appartenez. Bien que cela pourrait y ressembler, il ne s’agit pas ici de soudoyer les autres pour les gagner à Christ. Jésus ne dit pas que, par l’argent, on peut convertir quelqu’un. Mais on peut détruire la barrière du préjugé et créer le lien qui permet ensuite à celui qui a été sensible par un geste altruiste de notre part d’entendre et de recevoir autrement que sans ce geste le témoignage que nous voulons lui rendre.

Outre cette utilisation possible de nos biens pour gagner des âmes à Christ, âmes que l’on aura la joie de retrouver au ciel, Jésus nous dit que la gestion de l’argent est, dans nos vies, le 1er niveau à partir duquel Dieu éprouve notre loyauté et notre fidélité. Rien de tel que d’avoir entre les mains quelque chose qui peut nous corrompre pour évaluer notre fidélité à Dieu. Si donc, dit Jésus, nous ne sommes pas capables de passer avec probité le test de la gestion de biens inférieurs et injustes, comment Dieu pourrait-il nous confier des domaines de gestion bien plus grands et supérieurs : les biens spirituels de Son royaume, les âmes… ? Ne négligeons donc pas la façon avec laquelle nous gérons les biens et les capitaux que Dieu nous donne dans cette vie. Il est le domaine particulier dans lequel, aux yeux de Dieu, nous faisons ou non nos preuves, domaine qui peut, selon le cas, permettre à Dieu de nous ouvrir ou fermer la porte à la gestion de plus grands biens..

Jésus conclut son enseignement sur l’argent en disant que, face à lui, il n’y a pour nous que deux possibilités : ou celui-ci est notre maître, ou il est notre serviteur. Notre cœur qui ne bat que pour une seule chose ne peut, en tout cas, s’attacher à la fois profondément à Dieu et à l’argent. Ou, par amour, nous servons l’un et haïssons l’autre ou vice versa.

Que Dieu nous donne d’être libre de toute affection malsaine pour les richesses injustes !