La femme au parfum
Intéressons-nous maintenant de plus près à l’intruse, l’imprévue du scénario devenant soudain l’actrice principale de la scène, la femme au parfum. Etant l’inattendue, celle, pourrait-on dire, que Dieu impose au milieu de ce que les adversaires de Jésus se proposaient de faire, tous ses actes, ses gestes revêtent soudain une dimension spirituelle tels qu’ils en deviennent, et Jésus Lui-même le dira, la parole, le message qu’à cette heure, toutes les personnes présentes doivent recevoir du Père.
Oui, réellement rien ne s’est passé comme prévu ! Les pharisiens passaient leur temps à s’opposer à Jésus, à contester ce que les signes qu’Il accomplissait démontraient au sujet de Son identité. Sans doute, une fois de plus, avait-Il été invité dans cet esprit. Jésus n’aura pas Lui-même à se justifier, à prendre Sa défense. C’est le Père, au travers de cette femme de mauvaise vie, qui va leur faire Lui-même la leçon. Il peut nous arriver, comme le pharisien, de nous irriter, d’être contrarié par un élément perturbateur qui met par terre tous nos plans. Arrêtons-nous plutôt et demandons-nous si, à travers le grain de sable qui grippe la belle mécanique de nos projets, il n’y a pas de la part de Dieu un message, une parole qu’il nous faut entendre.
Quel est ce message que, au travers de la femme au parfum, Dieu a voulu faire entendre ici ? Pour illustrer le scandale que représente l’assortiment de la beauté et de la stupidité, le roi Salomon n’a pas hésité à écrire le proverbe suivant : Un anneau d‘or au groin d’un pourceau, c’est une femme belle et privée de bon sens : Prov 11,22. Un lien étroit existe entre le choc que représente l’illustration utilisée par Salomon et la situation dans laquelle l’Evangile nous place ici. Ce lien est celui du choc que représente pour Salomon le mauvais assemblage de la beauté et de la stupidité et, pour les pharisiens, celui de la dévotion que manifeste l’intruse, dont la réputation n’est pas à faire, envers Jésus qui se dit prophète, voire le Saint de Dieu. Dieu peut-il apprécier l’odeur d’un parfum que l’on a jeté sur un tas de fumier ? Telle est, en substance, la question que se posent les personnes présentes autour de Jésus !
Sans complexe, Jésus répondra par l’affirmative. Oui ! Quel que soit l’endroit ou le cœur duquel il sort, Dieu apprécie, aime le parfum des larmes de la contrition et de la repentance. Car c’est ce parfum seul qui lui rend possible de déverser sur celui qui en est la source, le Sien, celui de Sa grâce. Jésus le dit ici avec d’autres mots. Mais Sa pensée est claire : la seule personne qui, dans cette pièce, sentait bon aux yeux de Dieu était la femme pécheresse ; car, au-delà de la puanteur de sa vie mauvaise, elle a su faire monter jusqu’à Dieu, au travers de ses larmes, le parfum de l’amour, parfum né du pardon reçu. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que la femme, inspirée, a versé larmes et parfum sur les pieds de Jésus. De manière prophétique, elle annonce que ce sera de Ses pieds-là, percés pour elle, que jaillira la source du pardon et de la purification de son cœur. Sans qu'elle s'en rende compte, elle valide du même coup les affirmations de Jésus selon lesquelles Il est bien l'Envoyé de Dieu, le Messie annoncé par les prophètes. Elle communique d'autre part sans parole le message qui sera à la source de la distinction pour tous les siècles entre la vraie et la fausse piété. Ce principe est que c'est par le coeur d'abord, et non par la raison, que l'on connaît Dieu et le Christ. Seul le coeur réchauffé par l'amour de Dieu peut L'aimer et Le connaître comme le reconnaître !
Du passage de l’intruse, Jésus énoncera donc le principe qui est le secret de toute vraie piété et dévotion : un principe que, malgré toute leur connaissance et leurs œuvres, les pharisiens n’avaient pas acquis. Ce principe est que l’amour donné vient de l’amour reçu. Plus nous sommes conscient de notre indignité et de la grâce dont nous sommes l’objet de la part de Dieu, plus nous sommes en mesure de faire les gestes qui démontrent notre amour pour Lui et les autres. Que ce principe soit, par ta grâce renouvelée, celui qui nous anime de plus en plus.
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